Une nouvelle page s’ouvre, non sans tension, dans l’histoire de l’Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG). Ce vendredi, à la Maison de la Presse de Guinée, un groupe de cadres, militants et anciens responsables du principal parti d’opposition a procédé au lancement officiel d’un nouveau courant baptisé « Mouvement des Réformateurs de l’UFDG ». Présentée comme une dynamique d’unification de plusieurs voix dissidentes, cette initiative marque selon les responsables du mouvement, une rupture nette avec les pratiques actuelles au sein de la formation dirigée par Cellou Dalein Diallo.
La conférence de lancement a été introduite par Joachim Baba Millimouno, ancien responsable de communication du parti, qui a planté le décor : « Ce n’est pas une conférence du CERAG-UFDG, mais une évolution politique qui vise à mutualiser les efforts des militants frustrés pour faire renaître l’UFDG comme une véritable force de conquête du pouvoir ». Le ton était donné : la démarche ne s’inscrit pas dans une opposition frontale mais dans un appel à la transformation.
Le message central de cette rencontre a été porté par Nabi Idrissa Diallo, qui a livré une déclaration musclée aux relents de réquisitoire : « On exclut qui on veut, quand on veut, comme on veut. C’est la volonté du prince qui prévaut à l’UFDG ».
Dénonçant des dérives autoritaires, une gouvernance clanique et l’étouffement du débat interne, les Réformateurs se posent en défenseurs d’un retour aux fondamentaux : démocratie interne, débat contradictoire, justice pour les militants, et refondation du leadership.
Ce courant, avec l’appui de certains responsables, déjà présent dans plusieurs fédérations à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, affirme ne pas vouloir voir l’UFDG subir le même sort que d’autres partis historiques guinéens aujourd’hui marginalisés ou disparus. Il se donne pour ambition de « sauver » l’UFDG d’une lente agonie, qu’il impute à une direction fermée aux critiques internes.
Le professeur Lamarana Petit Diallo, figure intellectuelle du mouvement, a rappelé l’origine de cette initiative dans les activités du CERAG-UFDG (Cercle des Amis de Ousmane Gaoual), qui a depuis plusieurs années tenté d’impulser une réforme doctrinale du parti. À ses yeux, le Mouvement des Réformateurs n’est pas un coup de force, mais « l’aboutissement logique d’une réflexion collective, la transformation du CERAG en une structure politique organisée autour d’objectifs partagés ».
Il rejette par ailleurs les interprétations hâtives d’alliances ou de coalitions internes : « Il ne s’agit ni de jumelage ni d’alliance, mais d’une unification. Nous parlons désormais d’une même voix ».
Dans sa déclaration fondatrice, le Mouvement des Réformateurs de l’UFDG énumère cinq objectifs majeurs :
- Renouvellement du leadership via des mécanismes démocratiques et inclusifs.
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Réforme des statuts et règlements du parti pour garantir la libre expression.
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Restauration de l’unité militante, au-delà des clivages et des exclusions.
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Nouvelle stratégie politique, plus en phase avec les défis actuels de la Guinée.
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Réaffirmation des valeurs démocratiques, avec un hommage appuyé aux martyrs du combat politique.
À travers ce mouvement, les initiateurs semblent vouloir rompre avec une posture attentiste, quitte à fragiliser davantage une formation politique déjà en proie à de fortes turbulences internes. Derrière le vernis de la réforme, cette initiative laisse transparaître des fractures profondes et peut-être irréconciliables.
Si les Réformateurs assurent que leur combat vise à sauver l’UFDG de l’intérieur, il reste à voir si leur appel à la transformation sera entendu par la direction du parti, ou s’il sera perçu comme un acte de dissidence, voire de défiance.
Dans un paysage politique guinéen marqué par les incertitudes de la transition, cette fronde pourrait soit redonner un nouveau souffle à l’UFDG, soit accélérer sa fragmentation. Une chose est certaine : la bataille pour l’âme du parti est désormais ouverte.
Fatimatou Diallo pour regardguinee.org