Il y a seize ans, jour pour jour, la Guinée vivait une tragédie qui a choqué le monde entier : le massacre du 28 septembre 2009. Ce jour-là, des citoyens réunis au stade de Conakry ont été victimes de barbarie de la part de la junte alors au pouvoir, dirigée par le capitaine Moussa Dadis Camara. Plus de 150 personnes ont été tuées, des centaines blessées, et plus d’une centaine de femmes violées.
En ce 28 septembre 2025, date anniversaire de ce drame, l’Association des Victimes, Parents et Amis du 28 septembre (AVIPA) constate encore des insuffisances notoires dans la gestion du dossier, malgré l’ouverture du procès, la condamnation de certains accusés et l’annonce de mesures d’indemnisation.

Lors d’une conférence de presse organisée à Conakry, aux côtés de la Fédération Internationale pour les Droits Humains (FIDH) et de l’Organisation Guinéenne de Défense des Droits Humains (OGDH), la présidente de l’AVIPA, Madame Asmaou Diallo, a d’abord salué une avancée historique. « Pour la première fois en Guinée, des responsables de haut niveau ont été jugés pour des crimes d’une telle gravité. C’est une victoire partielle, obtenue grâce à la détermination des victimes, au courage des survivantes et à l’engagement constant de la société civile et de nos partenaires internationaux », a-t-elle déclaré.

Cependant, elle souligne que cette victoire reste incomplète et entachée de graves insuffisances. « Sur plus de 730 victimes constituées parties civiles et plus de 450 auditionnées, seules 334 ont été mentionnées dans la décision finale. Des centaines de victimes, pourtant reconnues dans la procédure, ont été invisibilisées dans le jugement. C’est douloureux, incompréhensible et injuste. Cela montre à quel point le chemin vers une justice complète reste long. »
Mme Asmaou Diallo a également dénoncé la grâce présidentielle accordée en mars 2025 à Moussa Dadis Camara, alors même que la procédure d’appel était en cours. « Cette décision politique a été vécue comme un véritable choc. Elle envoie un signal d’impunité et remet en cause la crédibilité du processus judiciaire. À cela s’ajoute le décret sur l’indemnisation qui, au lieu d’unir, a exclu de nombreuses victimes et créé de profondes frustrations. Une justice inachevée n’apaise pas les blessures, elle les aggrave. L’impunité ne réconcilie pas un peuple, elle entretient la colère, le désespoir et l’instabilité. »
À cette occasion, la présidente de l’AVIPA a lancé un triple appel :
«- Aux autorités guinéennes : Organiser sans délai le procès en appel, dans la transparence et l’équité.
Revoir le processus de réparation pour qu’il soit inclusif, définitif et juste.
Garantir que chaque victime reconnue bénéficie de ses droits sans discrimination.
Protéger les victimes, les témoins et les défenseurs des droits humains.
– À la communauté internationale (Nations Unies, Union africaine, Union européenne, CPI, partenaires bilatéraux) : Maintenir la pression pour que la Guinée respecte ses engagements en matière de justice et de droits humains.
Veiller à ce que ce procès historique ne devienne pas un symbole d’échec, mais un exemple de persévérance et de solidarité contre l’impunité.
– Aux victimes et à leurs familles : L’AVIPA reste à vos côtés, déterminée à poursuivre le combat pour que vos souffrances soient reconnues, vos droits respectés et vos vies réparées. Gardons l’espoir : la justice est longue et difficile, mais elle est inévitable lorsqu’elle repose sur la vérité et la détermination des victimes. Aujourd’hui, nous réaffirmons que la vérité, la justice et la réparation ne sont pas négociables. Le 28 septembre est et restera une journée de mémoire, mais aussi une journée de combat. Pour nos martyrs, pour nos survivantes, pour la Guinée et pour l’humanité tout entière. »
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